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Sunday, November 6, 2011

le francais est il menacé par ennahdha?


C’est un fait que la victoire Ă©crasante du Parti Ennahdha n’a pas fait que des heureux. En effet le succès sans appel des islamistes qui se disent modĂ©rĂ©s a suscitĂ© trouble et inquiĂ©tude chez beaucoup de Tunisiens. Conscients de cette frayeur, les dirigeants nahdhaouis n’ont eu de cesse de tenir dans les diffĂ©rents mĂ©dias un discours rassurant et souple. Mais visiblement, cela n’a pas eu l’effet escomptĂ© d’autant plus que sur un certain nombre de questions, les vainqueurs, tout en tendant la main aux autres partis, entretiennent ce qu’il convient d’appeler le flou artistique. InterrogĂ© par Samir El Wafi sur la chaĂ®ne Hannibal TV sur la place de la langue arabe qu’il entend renforcer, et celle des autres langues Ă©trangères, Rached Ghannouchi, le prĂ©sident d’Ennahdha, s’est montrĂ© plutĂ´t Ă©vasif. Cette question de
la langue constitue un point central dans les discours nahdhaouis si l’on se rĂ©fère Ă  la dĂ©claration du cheikh sur la pollution linguistique relative Ă  la langue française. Dès lors, des questions se posent.
Dans quel projet s’inscrit la volontĂ© du Cheikh de renforcer l’arabe ? S’agit-il plus globalement d’un projet de sociĂ©tĂ© sur lequel on reste discret? La langue arabe ne souffre d’aucun discrĂ©dit, que l’on sache. Bien au contraire, sa place dans les cursus primaire, secondaire et supĂ©rieur a Ă©tĂ© consolidĂ©e. Pas toujours avec pertinence, d’ailleurs. Ce dont on a rĂ©ellement besoin, c’est d’une refonte totale de la politique de l’Ă©ducation dont la dĂ©gradation se fait de plus en plus inquiĂ©tante.
Ce que l’on craint, sans vouloir Ă©riger une hostilitĂ© systĂ©matique et idĂ©ologique Ă  la vision d’Ennahdha, c’est que la consolidation de l’arabe se fasse au dĂ©triment du français en particulier. Que l’arabe soit une langue nationale, pierre angulaire de l’identitĂ©, qui peut en douter ? En revanche, force est de constater que la langue de Molière n’a jamais Ă©tĂ© une entrave, encore moins une menace Ă  notre identitĂ© arabo-musulmane. Pour preuve, les fondateurs de la Tunisie moderne, on s’en souvient, furent de parfaits bilingues, jaloux de leur identitĂ© nationale, mais en mĂŞme temps ouverts Ă  l’autre. Nous tendons Ă  croire que l’obscurantisme est le fruit de l’enfermement sur soi et la frilositĂ© du contact avec l’autre.
Ce que l’on craint en somme, c’est un repli que risque d’engendrer une politique d’arabisation massive dont on devine les effets malencontreux. Une telle option irait Ă  l’encontre de la vocation tunisienne ouverte par sa nature et sa gĂ©ographie. N’a-t-on pas besoin plutĂ´t de renforcer les langues Ă©trangères et en particulier le français. Il ne s’agit pas d’assujettissement, encore moins d’une attitude politique semblable Ă  celle Nadia el Fani et de Souhayr Belhassen, dĂ©cevantes, dans l’Ă©mission de France 2 « Mots croisĂ©s », demandant Ă  Hubert VĂ©drine d’intervenir pour la protection en Tunisie des valeurs en commun. Non, notre vision s’inscrit dans la foi que l’apprentissage de la langue Ă©trangère est une ouverture sur l’altĂ©ritĂ©, une dĂ©couverte de l’autre sur fond du prĂ©cieux dialogue des civilisations. La connaissance de l’autre, loin d’aliĂ©ner mon identitĂ©, lui permet de mieux se dĂ©finir et de relativiser les vĂ©ritĂ©s. La langue elle-mĂŞme ne peut Ă©voluer qu’au contact des autres langues. C’est cette vision humaniste que nous souhaitons voir se dĂ©velopper dans la Tunisie post rĂ©volutionnaire. L’histoire de l’humanitĂ© nous a montrĂ© que la connaissance des langues Ă©trangères est un vĂ©hicule privilĂ©giĂ© de progrès et d’enrichissement. La Renaissance europĂ©enne au XVIème siècle, et particulièrement française, est Ă  cet Ă©gard exemplaire. Cela n’Ă©chappe pas Ennahdha, qui signifie littĂ©ralement : renaissance.

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